Quelques heures avant son départ de Lomé pour la Can 2012, Seydou Keita été l’invité l’émission sportif de RMC (radio française) jeudi dernier.
Le milieu de terrain défensif malien est revenu sur son exceptionnel parcours, depuis ses débuts dans la pauvreté au mali aux sommets avec le FC Barcelone.
« Quand c’est difficile déjà pour manger.. »
En toute franchise il parle de sa jeunesse difficile : «Quand on est un jeune Africain, qu’on voit la misère qu’il y a en Afrique, on ne peut pas dire qu’on joue pour le plaisir. On joue pour gagner de l’argent, pour aider sa famille. Quand on quitte l’Afrique à 16 ans, on sait que c’est la meilleure opportunité pour aider ses frères et sœurs, ses parents. On a beaucoup de pression parce qu’il y a je ne sais pas combien de personnes derrière. Maintenant, on peut dire que je joue pour le plaisir. Mais quand j’ai quitté mon pays, ce n’était pas pour le plaisir. Quand c’est difficile déjà pour manger… », lâche-t-il ainsi. Une confession sur le passé.
« J’avais envie de jouer »
Malgré sa formation soldé par un contrat pro et un titre de meilleur joueur de la Coupe du monde U20 en 1999, les choses ne se sont pas fait aussi simplement au début: « Pour quelqu’un qui sortait du centre de formation (de l’OM), qui venait d’Afrique en plus, ce n’était pas facile de s’imposer. J’avais envie de jouer. J’ai tout fait pour être prêté, pour démontrer mes qualités. C’est ce que j’ai fait à Lorient. Après, Tapie est revenu au club. Il a tout fait pour que je retourne à Marseille. Mais j’étais bien à Lorient », détaille-t-il.
« J’ai grandi à Lens, j’ai tout connu »
L’explosion de sa carrière, Seydou Keita l’a vécu à Lens. En provenance du FC Lorient en 2002, il a mit du temps à s’imposer. D’abord utilisé comme ailier gauche par Joël Muller, c’est finalement Francis Gillot qui en le repositionnant dans l’axe du milieu de terrain. Ce qui lui permettra d’exploser et aussi de marquer 11 buts lors de la saison 2006-2007.
Et le RC Lens reste dans son cœur : »Mon passage à Lens (2002-2007) m’a beaucoup marqué. J’ai grandi à Lens, j’ai tout connu. La difficulté comme le bonheur avec les supporters, le staff, le club. Après mon départ, ça a été compliqué. Mais il ne faut pas le lier au départ de Seydou Keita. Il y a pas mal de paramètres qui entrent en compte. Un seul joueur ne fait pas un club. C’est difficile actuellement pour Lens. Mais j’espère pour Gervais (Martel), pour tous les supporters, que l’équipe va remonter« .
Avec Guardiola, « On ne se parle pratiquement pas »
La saison très réussie à Séville (2007-2008), s’est ponctuée d’un atterrissage en catalogne où il est devenu un des joueurs les plus appréciés de Pep Guardiola.
Mais à ce propos, Seydou étonne à propos de ses relations avec son coach: « Je crois que ça a commencé quand on a joué la finale de la Ligue des champions, la première année (2008-2009). Tout le monde avait envie de la jouer. Le coach m’avait proposé de jouer latéral. Un poste où je n’avais jamais joué avant. J’ai dit OK. Je ne suis pas égoïste, mais personne ne peut refuser de jouer une finale de Ligue des champions. Je pense qu’il a beaucoup de respect pour moi par rapport à ça. Mais je ne ressens pas ça avec le coach. On ne se parle pratiquement pas. Je suis quelqu’un qui n’aime pas parler et encore moins avec les entraîneurs. Le coach parle toujours bien des joueurs. Ce n’est pas qu’avec Seydou. Le coach ne me fait pas de cadeau ! Si tu n’es pas bon, il te met sur le banc ! », a-t-il lancé.
« Avec les jeunes il y a l’envie et surtout de la solidarité »
Apres avoir mis en parenthèse sa carrière, il revient dans la sélection en manque de repère. Il a la lourde tache d’orienter la nouvelle génération des Aigles et constate le nouvel état d’esprit.
« Avec Kanouté, Djilla et aussi Momo, c’est vrai qu’on avait des grands noms mais on n’a jamais pu former une vraie équipe. Et ça toujours été difficile parce que chaque fois on était parmi les favoris. Mais nous n’avons jamais su profiter de nos qualités et expériences pour monter l’équipe vers le haut. Là avec les jeunes, on ne va pas parler du passé, ce qui est bien c’est qu’il ya l’envie et surtout solidarité qu’il y avait pas avant. Parce que ces jeunes ont envie de prouver alors qu’avant on pensait individuel …maintenant on pense au groupe. »
« Djilla, il a fait une belle carrière … »
Seydou a porté un démenti sur ses supposés mauvaises relations qu’il aurait avec Mahamadou Diarra.
« Ceux sont des bêtises…c’est comme on disait que Zidane ne s’entendait pas avec Henry mais ça s’est pas vrai. Vous savez on joue au foot et on défend les couleurs du Mali, après on n’a pas besoin d’aller manger tous les jours ensemble : il ya des affinités partout où on est. Au Barça je m’entends bien avec Eric (Abidal) mais cela ne veut pas dire que je ne m’entends pas avec Léo(Messi) ou les autres. Vous savez en Afrique, au lieu de souder les gens, on a tendance à nous séparer, monté des coups et des rivalités. Mais Djilla, il a fait une belle carrière même si on ce moment c’est un peu difficile pour lui et moi aussi. On est parti tout jeunes de l’Afrique, on était rien du tout. Et on a la chance d’avoir tout ce que l’on a actuellement, pourquoi être jaloux ? Moi je n’ai jamais été comme cela et les gens qui me connaissent bien savent que ce n’est pas vrai. J’ai tout eu…pourquoi être fâché avec quelqu’un? Ce n’est pas vrai.»
«… Il a voulut un peu écouter les autres…»
Il est revenu sur ses rapports un peu tendus avec Alain Giresse : «Au début c’était un peu difficile. Moi j’avais pris du recul par rapport à la sélection parce que il ya avait pas mal de problèmes. Et quand il est venu il ne connaissait pas bien le Mali donc il a voulut un peu écouter les autres sans vraiment prendre en compte mon avis. Mais ça s’est du passé. Maintenant ça se passe très tres bien. De toutes les façons on a les mêmes objectifs, les résultats. Nous avons intérêts de nous entendre pour les avoir…. »
Gagner enfin un titre avec le Mali…
Même si cela reste une fierté pour lui d’avoir gagner autant de trophées avec le FC Barcelone, Seydou Keita rêve d’être sacré avec le Mali.
« Ça fait plaisir de gagner tous ces titres avec le Barça. Mais c’est personnel. En prenant du recul, c’est vrai qu’avec le Mali j’ai toujours eu la chance d’apporter, d’être décisif en général avec l’équipe. Mais après avoir gagné tous ces trophées, j’aimerais gagner quelque chose avec mon pays. Je sais que cela ne sera pas facile mais j’ai envie de gagner quelque chose que les autres joueurs maliens, les grands noms, tel que Salif Keita et les autres n’ont pas pu faire. »
Lien pour ecouter l’emission: http://podcast.rmc.fr/channel33/20120119_courbis_1.mp3