Venu au Mali pour ses vacances, Mahamadou Diarra dit Djilla du Réal de Madrid, Capitaine des Aigles du Mali, nous a reçu le dimanche 8 juillet dernier dans sa luxueuse maison de Magnambougou Faso-Kanu au bord du fleuve. A bâtons rompus, nous nous sommes entretenus avec lui de plusieurs questions relatives à son club et aux Aigles. Djilla est très confiant en la qualification des Aigles du Mali à la Coupe d’Afrique des Nations (CAN), prévue au Ghana en 2008. Selon lui, il est inadmissible que le Mali rate deux CANs successives. Pour Djilla, le match contre le Togo du 9 septembre sera la revanche de la défaite du 27 mars 2005 à Bamako.
(Réalisé par Alou B HAIDARA du journal L’Indépendant du 11/07/2007)
L’Indépendant : Bonjour. Vous êtes au Mali dans le cadre des vacances, comment se passe votre séjour ?
Mahamadou Diarra dit Djilla :
Effectivement, ce sont les vacances. C’est dans ce cadre que je suis au Mali depuis deux semaines pour voir mes parents et mes amis. Le séjour se passe très bien, sans aucun problème. C’est l’occasion pour moi de me relaxer, de me reposer, avant la reprise.
Comment avez-vous vécu la dernière saison avec votre club, le Réal de Madrid ?
Bien, même si le début a été un peu difficile pour moi. Vraiment, je peux dire que la saison s’est passée normalement. Nous avons pu faire l’essentiel, en remportant le titre de Champion d’Espagne, ce qui nous avait été demandé par les responsables du club. Nous avons eu aussi la chance de remporter la Liga. Mais, je suis sûr que je peux faire encore mieux les prochaines saisons.
Combien de buts avez-vous marqués au cours de la saison écoulée ?
Quatre, seulement, dont trois en championnat et un en Champion’s League.
Quelle est l’apport de Djilla au sein du Réal ?
Je n’aime pas parler de moi. Vous êtes, en tant que journaliste, mieux placé pour faire des analyses.
Avez-vous un secret ?
Mon seul secret, c’est l’entraînement. Je m’entraîne à chaque fois à fond, parce que j’ai dans la tête de ne pas décevoir les gens qui se sont battus pour moi, qui ont permis mon transfert de Lyon au Réal de Madrid. Je sais aussi que je suis apprécié par beaucoup. C’est compte tenu de tout cela que je me donne toujours à fond afin de corriger mes lacunes. Aucun joueur n’a de secret, c’est le travail seul qui fait la différence entre nous.
Comment voyez-vous la saison prochaine ?
Je crois que ça va être dur, très dur. Toutes les équipes nous attendent de pied ferme. En tout cas, nous ferons tout pour conserver notre titre et, pourquoi pas, confirmer en Ligue des Champions. Tout est possible.
Quelles sont vos relations avec les autres joueurs africains évoluant en Espagne ?
Je m’entends très bien avec eux. Nous sommes en contact continuellement. C’est un peu comme une famille. Cela nous fait plaisir quand on s’appelle, on se rencontre, on joue l’un contre l’autre, même si nous nous affrontons vraiment sur le terrain.
Si Djilla quittait aujourd’hui le Réal, où irait-il ?
Franchement, je ne sais pas. Vous savez, le Réal est le meilleur club du monde. J’ai vécu beaucoup de choses dans ce club, que je n’avais jamais vécu auparavant. Sincèrement, le Réal c’est le sommet. Tout le monde rêve d’y jouer. Je remercie le bon Dieu et mes parents de m’avoir donné la chance de jouer dans ce club. Si je quitte le Réal, je ne vois pas dans quel club j’irais. Je dis haut et fort, si les dirigeants de ce club me proposent dix ans de contrat, je n’hésiterais pas à signer.
Concrètement, comment vous sentez-vous dans ce club ?
Je m’y sens très bien. Ce n’est pas par hasard que j’ai dit que j’étais prêt à signer pour dix ans au Réal. Parce que, tout simplement, c’est un club très sérieux, où on peut apprendre beaucoup de choses. Je crois aussi que le Réal Madrid est plus qu’un club.
Comment avez-vous vécu vos débuts à Madrid ?
Ce fut dur, très dur. Comme vous le savez, tout début est difficile. Il faut connaître des moments éprouvant dans la vie pour arriver au top. J’étais sûr que ça allait être difficile et ce n’est encore fini, puisqu’il faut se maintenir. Au début, j’ai eu beaucoup de difficultés pour m’adapter au football espagnol. Quand tu joues en France et que tu vas en Espagne, tu trouves une grande différence. C’est diamétralement opposé. Les niveaux des championnats ne sont pas les mêmes. Selon moi, le championnat espagnol est le plus difficile au monde. Je suis quand même content parce que ma période d’adaptation n’a pas duré trop longtemps, même si, j’ai eu souvent des hauts et des bas. Le plus important pour moi était d’être présent jusqu’à la fin. Aujourd’hui, je peux dire que je me suis sorti de toutes ces embûches la tête haute.
Comment Djilla voit-il l’équipe nationale du Mali, les Aigles ?
J’ai toujours eu confiance en cette équipe. Je sais que les supporters des Aigles n’étaient pas du tout contents de nous. Nous les comprenons. Mais il faut qu’ils comprennent une chose, c’est que le football est un sport difficile. Quand on voit un pays comme l’Espagne, tout ce qu’il dépense dans le football, tout ce qu’il a fait pour le football mondial et qu’il n’a, à ce jour, remporté qu’une seule Coupe d’Europe, on s’en rend compte. C’est vrai que nous avons une équipe nationale de niveau africain seulement, puisque nous n’avons jamais participé à une Coupe du Monde. Nous sommes pourtant là pour défendre les couleurs de notre pays, que ce soit au Mali ou à l’extérieur. Nous devons donc nous battre pour gagner, comme tous les autres joueurs qui représentent leur nation. Nous sommes conscients aujourd’hui de nos mauvais résultats, comme le prouve notre classement FIFA. Je pense que nous pouvons faire mieux, plus. Malheureusement, le bon Dieu en a décidé autrement. Je ne peux dire que nous avons mal joué sur les deux matches (aller et retour) contre le Bénin et la Sierra Léone. Je pense que quand une équipe joue très mal, elle ne peut se créer autant d’occasions de buts que nous. Nous avons joué collectif et nous nous sommes créé des occasions, sans pour autant trouver la faille. Je pense que c’était surtout la faute de la malchance. Nous souhaitons que le bon Dieu nous offre nos chances à Lomé.
Etes-vous confiant aujourd’hui en la qualification des Aigles à la CAN 2008 ?
Bien sûr. Je suis très confiant. Déjà, dans nos têtes, le match Togo-Mali est une revanche. Ils sont venus nous battre en 2005 devant des milliers de Maliens. C’est à nous d’aller à Lomé avec une équipe revancharde pour gagner. Tout dépend de nous actuellement. Je crois qu’on ne doit plus se chercher des excuses. C’est un match que nous avons 90% de chances de gagner. Nous n’avons pas le droit d’être absents de la CAN 2008, car on nous a toujours dit qu’une grande équipe africaine ne peut pas rater deux fois consécutivement ce rendez-vous du football continental. C’est impossible. C’est vous dire que je suis sûr que le Mali va se qualifier.
Comment avez-vous apprécié la décision de la FIFA concernant le match Mali – Sierra Léone ?
Elle nous a vraiment choqués, parce que ce n’est pas aujourd’hui qu’on va changer les règlements de la Fifa. Tout le monde les connaît. Ils sont très clairs: la priorité est toujours donnée au pays d’origine du joueur. Le club vient en seconde position. Après un match, le joueur a également droit à 72 heures de repos avant de rejouer avec son équipe. Ce ne fut pas le cas. Comme on sait que le Réal est un grand club, Ils n’ont pas pu le manipuler, car le 17 juin n’est pas une date fixe de la Fifa. Nous n’avons rien compris. Nous avons reçu un fax à Kabala déclarant que si Diarra et Kanouté restaient au Mali, dans les 72 heures le pays serait suspendu de toutes les compétitions internationales et les joueurs aussi, mais pas avec leur club. Nous ne voulions pas que notre pays soit frappé d’une telle sanction, d’autant que nous avions beaucoup de joueurs qui pouvaient nous donner la victoire. Je crois que cette décision témoignait d’un manque de respect vis-à-vis du football, des joueurs africains et des dirigeants africains. Puis, du jour au lendemain, la FIFA a remis les règlements en place, après avoir présenté ses excuses. Imaginons que le Mali ait perdu ce match !
Quel sentiment vous a animé après la victoire de vos coéquipiers ?
J’ai su à la mi-temps que le Mali menait un but à zéro sur un penalty de Djibril Sidibé. J’avais mon portable ouvert dans les vestiaires. Malheureusement, nous perdions à Madrid par 1 but à 0 au même moment. C’était bon d’un côté et dur de l’autre. Je savais que le Mali allait faire un carton, parce que le plus difficile, pour nous, c’est de commencer à marquer. Quand nous arrivons à marquer un but en première mi-temps, ça va très bien ensuite. Finalement, ça s’est très bien passé des deux côtés. J’ai donc fait doublement la fête.
Les supporters reprochent à Djilla de ne pas se donner autant quand il joue avec les Aigles qu’au Réal de Madrid…
Moi, je pense le contraire. Mais, j’assume, parce que ce sont des gens qui aiment le Mali et qui veulent qu’on gagne tout le temps. Il faut qu’ils se mettent en tête qu’on ne peut pas gagner tous les matches, tout comme on ne peut pas toujours être en forme. Ce n’est pas parce que je joue au Réal de Madrid que je ne me donne pas à fond avec les Aigles du Mali. Ce n’est pas du tout vrai. Chacun a sa matière de juger. Moi, en tant que professionnel, je suis habitué à ces critiques. Il faut que les gens soient plus compréhensifs afin de protéger leurs joueurs et leur pays. Mon souhait le plus ardent aujourd’hui est d’arracher notre qualification. Je pense que tout le problème entre les supporters et nous se trouve à ce niveau.